ALLER PLUS LOIN

Tous nos articles sont ici
ACCUEIL DU SITE | DOCUMENTATION | [ARTICLE]


Quand le FNI nous jouait des tours



Un petit historique pour mieux comprendre


Entre 1950 et 2009, le système FNI a eu le temps de trouver sa méthode de fonctionnement et, pour la plupart d'entre nous, celui-ci paraissait assez simple à dire vrai. Seulement voilà, dans la vie, les choses ne sont pas toujours aussi simples qu'elles n'y paraissent et voici donc quelques petites particularités qui ont pu nous échapper.
Commençons par le commencement. Le système est basique au mois de mars 1950, des départements en France métropolitaine que l'on indexe de 01 à 90 et de 91 à 94 pour l'Algérie qui à l'époque, n'a pas encore pris son indépendance. Tout le monde compte de 1 à 999 excepté le département de la Seine, numéroté 75 et porté par Paris, qui concentre le plus grand nombre de véhicules en circulation. Au milieu, une lettre allant de A à Z puis de AA à ZZ lorsque 999 Z 00 (00 repésentant ici le numéro du département) a été distribué (9999 Z 75 pour la Seine). Les lettres I et O ne sont pas utilisées pour éviter une confusion avec les chiffres 1 et 0. La lettre D seule n'est pas distribuée car réservée à l'administration (on passe donc de 999 C 00 à 1 E 00), la lettre W seule est réservée aux garages (on passe de 999 T 00 à 1 U 00) et pour les combinaisons de lettres, on garde initialement MA et TU pour le Maroc et la Tunisie qui sont à l'époque sous protectorat français (ses combinaisons seront distribuées par la suite dans de nombreux départements), CD pour les véhicules diplomatiques et WW pour les immatriculations temporaires. Pour les combinaisons plus discutables comme KK, PD, PQ, QQ ou WC, en 1950 la question ne se pose pas encore mais au final ce sera à la discrétion des départements. SS sera distribué dans certains départements avant d'être définitivement banni ensuite (c'est d'ailleurs aujourd'hui la seule combinaison systématiquement sautée dans le SIV). La lettre U sera abandonnée à la fin des années 80 par sa confusion facile avec la lettre V.

Petite mise au point, nous sommes en 1950. Dit comme cela, ça n'a l'air de rien, mais à l'époque, pour téléphoner c'est une aventure, il y a encore des opératrices pour mettre les gens en relation et la communication est onéreuse. Inutile de dire qu'envoyer un mail ou un SMS n'est même pas ne serait-ce qu'un projet pour le futur et imaginer dialoguer un jour avec la Chine ou les Etats-Unis depuis n'importe où y compris depuis son smartphone, peut paraître comme une inconcevable folie. Alors à l'époque, lorsqu'on veut rédiger un document, ce n'est pas un clavier et une imprimante qui sont nécessaires mais un outil incroyable, la plume. Oui, le stylo à bille est encore un concept peu développé en 1950, c'est d'ailleurs l'année de l'essor de la marque Bic. Bref, la carte grise est un document officiel que l'on rédige avec application et chaque numéro d'immatriculation est consigné en parallèle dans un registre. Le concept n'est pas nouveau, il en va ainsi depuis que l'on immatricule des véhicules, donc depuis le début du Siècle, mais il est de bon ton de rappeler à l'heure où tout se remplit à l'aide de formulaire en ligne et d'algorithmes, qu'à l'époque, rédiger un document officiel, est un acte nécessitant du temps et de l'application.

Aussi longtemps qu'il a été nécessaire de rencontrer quelqu'un de manière physique pour obtenir sa carte grise, il y a eu un intérêt de la part de certains à imaginer qu'il était possible d'obtenir une immatriculation plus sympathique en échange, à minima, d'un joli sourire et, l'informatique n'existant pas, après tout, il était tout à fait possible d'écrire plus loin dans un registre ou même d'ouvrir un autre registre.
Concrètement, un registre, ce sont 1000 numéros. Cinq numéros sur un page (celle de gauche) avec les caractéristiques du véhicule, sa précédente immatriculation s'il y a lieu, ses différents propriétaires sur la page de droite (avec des ajouts découpés si la voiture a souvent changé de main), des mentions ajoutées par tampon ou écritures manuscrites telles que le gage, le vol, la mutation dans un autre département et enfin parfois la destruction. Le registre restait le document plus important de tous, car il permettait aux forces de l'ordre de s'y référer mais aussi de faire le lien au grè des changements de départements que le véhicule pouvait subir à mesure des déménagements ou revente... Si en 1950, les mouvements n'étaient pas en core très nombreux, il y a vite eu une explosion des actes administratifs avec l'essor de l'automobile dans les années 50 (la 4 CV et la Dauphine étant des stars de cette époque). Certains registres sont aujourd'hui devenus les témoins de périodes de l'histoire. Par exemple, le registre de 1 à 1000 BA 33 qui date de juillet 1962, est rempli dans sa quasi intégralité, de véhicules immatriculés précedemment en Algérie, témoignage de l'exode des Pieds-Noirs vers la France Métropolitaine après la signature des accords d'Evian en mars 1962.
Tous ces mouvements de cartes grises, dans certains départements, peuvent vite donner des suées aux agents administratifs et certains départements vont donc trouver des astuces pour gérer les choses plus facilement.

Les séries parallèles
Certainement 'l'astuce' la plus utilisée. Concrètement, vous vous dites certainement que le numéro 1 BA 33 a été attribué juste après le 9999 AZ 33. Biiiip, mauvaise réponse ! La faute aux séries parallèles. Concrètement, les départements ont ouverts de manière simultanée plusieurs registres pour y gérer plus facilement les informations consignées. Un registre pouvait par exemple être réservé aux véhicules neufs alors qu'en parallèle un autre était ouvert pour les véhicules ré-immatriculés. Dans certains départements, certains registres et combinaisons de lettres, pouvaient être utilisés pour un arrondissement / sous-préfecture. L'idée étant de limiter les déplacements des registres. Reste que pour une personne cartésienne il peut apparaître difficile de concevoir que le 9999 AY 33 a peut-être été attribué bien après le 2 BA 33.



Les sauts de numéros
Plusieurs raisons ont parfois conduites au saut de numéros. La première a été par exemple la mise en place de l'informatisation des données. Chaque département a transité entre les années 70 jusqu'à 1990 de la consignation dans des registres papiers vers des fichiers informatiques que l'on a mutualisé ensuite en 1994 dans le fameux FNI. Cette migration, a souvent stoppé net un registre papier déjà entamé. En Gironde par exemple, la série EH 33 est stoppée au 3372 EH 33 et la continuité se fait informatiquement à partir du 11 EJ 33. Vous trouverez un article complet et intéressant sur le site de Francoplaque (https://francoplaque.fr/site_html/f_rec9f.html).
Parfois des registres ont été stoppés sans raison apparente, en Gironde la série BY se termine sans raison au 6350 BY 33.
Autre raison de sauts, la réservation de plages de numéros. Les cas les plus connus étant les séries PR 75 (du 1 au 499) et APR 75 reservées aux véhicules de la Présidence de la République mais ce ne sont pas les seuls cas. Par exemple, le passage de 9999 ZZ 75 à 1 AAA 75 en mars 1974 a été une source de demandes importante et l'intégralité du registre allant du 1 au 999 AAA 75 a été bloquée pour des réservations. Dans la réalité, le registre est loin d'être rempli en intégralité et les premières pages ne contiennent que les 1, 5, 7 et 10 AAA 75. Le reste ? Vide, les 2, 3, 4, 6, 8 et 9 AAA 75 n'ont tout simplement pas été attribués.
Autre petite curiosité, le saut à Paris des séries MMM, MMW, MWM et MWW. Ces lettres ayant la particularité d'être un poil trop encombrantes sur une plaque d'immatriculation, associées, elles auraient empêché le respect d'espace suffisant entre les caractères sans devoir déborder de la plaque ou la rendre tout simplement illisible. C'est donc là une contrainte technique même si dans la réalité on a vu des immatriculations temporaires en WWM être attribuées avec des numéros supérieurs à 1000 qui inscrivaient donc neuf caractères sur des plaques normalement conçues pour en accueillir huit. La typographie était simplement souvent adaptée en conséquence (typographie plus fine et plaques plexiglas en général) mais il peut également être rappelé que ces numéros n'étaient généralement pas attribués plus de quinze jours...



L'attribution multiple
Nous évoquions les AAA 75, voici la grande subtilité du FNI et des registres papiers. L'attribution multiple, on pourrait appeler ça doublette fantôme pour donner un style à cette étrange coutume mais la réalité n'est pas si romanesque, c'est juste quelque chose qui mérite que l'on s'y attarde un peu. Attention, c'est plus compliqué mais pas insurmontable à comprendre. Nous l'avons dit, jusqu'à la fin des années 70, ce sont essentiellement des registres papiers et, le papier, ça se manipule. Concrètement, lorsqu'un véhicule avait dans sa vie énormément de propriétaires, il était possible d'agrafer sur les pages des registres, d'autres pages vierges découpées que l'on pouvait continuer à remplir. Dès lors, si c'était faisable pour les propriétaires, ça l'était aussi pour la voiture elle-même.
Quoi ?? Vous avez bien lu oui, mais il y avait tout de même des règles que l'on va expliquer par deux exemples concrets.

Ceux qui ont vécu dans les années 70 s'accordent tous à dire que le 1 AAA 75 était porté par une Matra Bagherra, ce n'est pas une légende ou un fantôme, des gens ont bien croisée cette auto à une époque, au moins jusqu'en 1980 pour être précis. Ce qu'ils ignorent peut-être, c'est qu'il n'y avait pas une Matra mais deux Matra pour ce numéro ! En réalité le registre contient un premier véhicule immatriculé le 12 juillet 1974 en QM 27 et prenant le 1 AAA 75 sur réservation le 19 juillet 1974 (rappelons que la série date de mars 1974 et que le registre n'a donc rien mentionné entre mars et juillet). Le 10 mai 1976, ce véhicule est certainement revendu et prendra un nouveau numéro en BBX 75. Notons la mutation au passage dans le même département, procédé que l'on aura connu plus tard avec la Peugeot 607 de la préfecture du Var immatriculée 11 AAA 83 et mutée ensuite sous un numéro tout a fait banal dans le même département à sa revente. On retrouve également ce procédé sur les Citroën C6 de la Présidence de la République acquises sous le mandat de Jacques Chirac en 19 QGS 75 et 19 RAA 75 et mutée ensuite en 665 et 641 QXZ 75. Mais revenons donc au 10 mai 1976, la Matra 1 AAA 75 prend donc une immatriculation en BBX 75. Le numéro 1 AAA 75 n'est pas radié pour autant puisqu'il est attribué à une autre Matra. Même propriétaire, même immatriculation, même modèle de véhicule mais pas du tout le même numéro de série, c'est bien un autre véhicule qui lui-même sera muté en RK 27 en mai 1980.

Un cas unique ? Non pas du tout, à la création du département du Val-de-Marne en octobre 1965, la préfecture réserve les cinq premiers numéros. On y trouve que des Citroën ID ou DS toutes au nom de la préfecture. Mais là encore, chaque numéro a été utilisé plusieurs fois de manière successives par plusieurs Citroën ID/DS au nom de la préfecture. Les numéros ont bien été amortis et si on prend le 3 A 94, on ne compte pas moins de quatre véhicules différents entre 1965 et 1976 date à laquelle l'immatriculation a été radiée, pour la même immatriculation !

BASE DE DOCUMENTATION INAXYS

NOS FICHES D'AIDE



Pour rappel, les articles concernant le département de la Gironde sont ICI


# Date de publication Titre Catégorie
08-07-2021 CNIT / TVV / TYPE MINE : Quelles différences ? TECH
08-03-2022 Bien lire son certificat d'immatriculation / carte grise ADMIN

NOS ARTICLES

# Date de publication Titre Catégorie
21-01-2014 L'histoire exclusive du AA-001-AA SIV
08-07-2021 Réserver un numéro c'est possible ? TS SYSTEMES
08-07-2021 Les voitures présidentielles et ministérielles TS SYSTEMES
13-07-2021 JO 73, la série olympique FNI
24-01-2024 2009-2024 : Quinze ans de SIV, les stats plus ou moins utiles du SIV SIV
25-10-2024 Quand le FNI nous jouait des tours FNI

NOS TABLEAUX

# Date de publication Titre Catégorie
13-07-2021 AA-AA - L'intégralité de la première série du SIV SIV
12-07-2021 ZZ / AAA - Les passages de 2 à 3 lettres FNI
14-07-2021 Les passages de 999 à 9999 numéros FNI
14-07-2021 Les derniers U attribués FNI
16-03-2022 Les derniers numéros de chaque année FNI